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Politique et développement patrimonial en Chine

Retour d'étudiant

Mon stage de Master 2 s’est effectué au sein de l’unité de recherche du WHITRAP (World Heritage Centre for Training and Research in Asia and Pacific), à Shanghai. Il s’agit d’un centre de catégorie 2 sous les auspices de l’UNESCO, spécialisé sur les questions de politiques patrimoniales. Il s’agit d’une institution publique, hébergée au sein de l’Université de Tongji, J’ai donc principalement assisté Marie-Noël Tournoux, Project Director, dont les missions étaient notamment liées à des problématiques urbaines, comme l’accompagnement à la constitution d’un réseau de villes du Delta du Yangzi, souhaitant valoriser leur patrimoine tout en l’intégrant au développement urbain et à l’attractivité des villes. J’ai également pu participer à l’organisation d’une conférence internationale prévue pour début 2020, sur le concept de Historic Urban Landscape (HUL) et comment le lier à la question du logement en centre urbain.
 
En elles-mêmes, les missions ont impliqué de la recherche documentaire, quelques sorties de terrain et prises photographiques notamment dans certains quartiers de shikumen lilongs à Shanghai, des comptes rendus de réunion, de la traduction de documents – la langue de travail du WHITRAP étant l’anglais, nous utilisions également le français dans certains cas – de l’aide à la préparation de lectures et conférences, avec à la fois une participation au contenu et à la forme (diaporamas, brochures). J’ai eu l’occasion d’assister à plusieurs conférences et journées d’études, données dans les locaux mêmes du WHITRAP, ce qui m’a permis d’entrer en contact avec certains universitaires et doctorants sur places, de différentes nationalités. En effet, le WHITRAP travaille notamment avec les membres du CAUP (College of Architecture and Urban Planning) de Tongji, qui rassemble un certain nombre de chercheurs et praticiens, et constitue un véritable épicentre de la recherche chinoise et shanghaienne sur les problématiques urbaines. De ce point de vue-là, le stage fut donc réellement riche, par les rencontres effectuées, et surtout par l’exemple donné d’une réelle jonction entre activités de recherche, d’enseignement, d’activités prospectives, d’activités d’accompagnement et de conseil. Nous avons enfin effectué un voyage de trois jours dans la ville de Tongli (à environ 2 heures de Shanghai), afin d’y rencontrer maire et acteurs locaux, atour du développement d’un réseau des villes du Delta du Yangzi, mentionné plus haut. Ce voyage, avec la participation d’une délégation française du réseau des Petites Cités de Caractères de France, fut l’occasion d’assister aux interactions et au dialogue qui permettent de donner corps à une coopération internationale, avec des expertises et expériences mises en commun pour des intérêts de développement local.
 
La variété des missions ainsi que des acteurs rencontrés, dans le contexte d’une ville telle que Shanghai, fut donc une expérience réellement enrichissante, notamment pour comprendre comment les différents praticiens de l’urbain peuvent interagir et collaborer, autour d’une réflexion commune sur le développement des villes. La possibilité de travailler dans une équipe internationale, en Chine, sans pour autant parler encore le chinois, m’a aussi permis de me rendre compte de l’ampleur des opportunités, et de l’importance de la collaboration internationale, même pour répondre à une demande ou des besoins locaux. Le travail sur un réseau de villes autour de Shanghai, au sein du delta du Yangzi, a permis de remettre en perspective les liens d’une mégapole de 25 millions d’habitants avec son territoire alentour. Enfin, la question patrimoniale, complètement intégrée à des problématiques de développement urbain, fut pour moi une nouvelle manière, particulièrement stimulante et féconde, d’aborder le concept de patrimoine, notamment à travers la réflexion autour de HUL (Historic Urbain Landscape), de la problématique du logement, ou encore de ce que cela peut impliquer de valoriser un patrimoine, tout en se souciant du développement local, et non pas seulement de l’économie touristique.

 
Helena ROUX

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Restitution


Résumé de mémoire
Ce travail de recherche de Master 2 porte sur les liens entre politiques et patrimoines du XXe siècle à Shanghai, une mégapole globale, hétéroclite, évolutive, et soumise à des pressions de développement économique et démographique qui s’intensifient. Il s’agit de comprendre comment l’approche patrimoniale entre en lien avec des stratégies de développement urbain, qu’est-ce que les patrimoines disent d’une représentation de la ville, et quels discours politiques sont à l’œuvre. La réflexion se construit à partir de l’étude du M50, un ancien ensemble industriel du début du XXe siècle, aujourd’hui rénové et réemployé en espace artistique, labellisé Creative Cluster par la ville de Shanghai. Ce sont les artistes, qui, durant les années 1990, arrivent peu à peu à s’émanciper du joug institutionnel public dans un contexte d’ouverture internationale de la Chine, et occupent ces lieux et participent à leur rénovation, à leur régénération. Le M50 devient alors l’objet d’un rapport de force implicite entre ce qui se constitue comme un groupe social, bien que marginalisé, soit les artistes, et ceux qui régulent habituellement les processus de développement urbain à Shanghai, les pouvoirs publics et les promoteurs privés. L’enjeu, qui est de garder le M50 et d’en faire un espace de travail, de rencontres, de ressources et d’exposition pour les artistes, pose également la question du droit à disposer, et avoir un impact sur l’espace urbain, pour les populations habitantes. En cela, peuton dire que le M50 dans son état actuel participe à ouvrir nouvelles manières de repenser l’espace public ? La notion de patrimoine, qui se rapporte proprement à l’identité du groupe qui le revendique, permet ici de comprendre en quoi donner telle ou telle fonction au M50 participe d’un processus d’identification du groupe que sont les artistes à Shanghai dans les années 1990. La valorisation actuelle du M50 comme lieu de production artistique et d’une vie culturelle foisonnante et internationale, à Shanghai, son intégration dans le projet de réaménagement de la Suzhou Creek, axe fluvial qui longe le Nord du centre shanghaien, montrent la récupération et l’institutionnalisation actuelle du lieu par les pouvoirs publics. Le patrimoine industriel dans son caractère aujourd’hui international et recherché, soulève la question des stratégies patrimoniales comprises dans les stratégies de développement urbain ; le patrimoine comme apport culturel et touristique, gage d’un développement économique, ou comme élément d’une possible urbanité ? L’étude du M50, mise en perspective avec le contexte politique patrimonial chinois, et Shanghaien en particulier, et avec l’échelle internationale, permettent donc d’aborder ces questionnements, à la fois en termes de politiques publiques, d’espaces publics, et d’uniformisation urbaine et culturelle possible.